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Quand le mal de chien se met à ressembler à un délicieux gâteau sans fruits à coques plein d'énergie...
J'ai eu beaucoup de mal à remplir le dossier MDPH, c'est vrai, on a toutes du mal avec ça.
J'ai mis beaucoup de temps, j'ai beaucoup pleuré aussi, ce sentiment d'achever ma fille, de lui envoyer une flèche dans le dos...
Je l'ai pourtant fait, soutenu par ma meilleur amie qui m'a un peu ramassée sur ce coup il faut l'avouer et m'a aidée a utiliser cette douleur qui m'habitait pour le remplir, vite fait bien fait sans m'y attarder certes... Mais à coucher sur papier nos problèmes et nos limites et demander l'aide qu'il faudrait pour Alysse, que je ne peux lui apporter...
Ensuite ce dossier est resté enfermé dans un placard, je ne pouvais le regarder, le blocage, la douleur toujours là...
Puis quelqu'un m'a donné un déclic, ce blocage n'était pas que dans mon placard, j'ai compris qu'il fallait l'envoyer maintenant il était temps, réunir les dernières pièces manquantes au dossier et le poster...
Il est parti, j'ai fermé les yeux serré les dents, mon estomac à fait un noeud en le mettant dans la boite, je me disais "mais qu'est ce que je fais ?" cette flèche je la voyais toujours.
Puis j'ai reçu la confirmation, mon dossier est bien arrivé il va passer en commission nous serons tenues au courant de la réponse dans les plus bref délais (qui sont assez longs). Là j'ai eu envie de les appeler, de leur dire de jeter vite le dossier, de nous oublier, qu'on n'existe pas..
Mais quand le dimanche matin qui a suivi, ma fille est venue vers moi les larmes aux yeux me faire part de son isolement "Maman, c'est pas marrant de manger toute seule à la cantine, je voudrais manger avec toi.", j'ai alors su que j'avais fait ce qu'il fallait.
Et si une flèche atteint son petit coeur d'enfant, je ne pense plus que c'est la mienne.
Je n'ai plus de solution à lui proposer, je lui fais à manger, je me bats partout pour qu'elle soit intégrée, qu'on ne la regarde pas comme une enfant handicapée, que l'on ne la considère pas comme une enfant malade, elle suit juste un régime rien de plus finalement... mais là elle m'a mis en face de mes limites, ça m'a déchiré le coeur de la voir ainsi et de ne rien pouvoir faire de plus. Rien de plus ? si je l'ai fait ! Ce dossier je l'ai envoyé, peut être que s'il passe je pourrai être auprès d'elle à chaque moment d'isolement, c'est-à-dire à chaque repas... En tout cas c'est la demande que j'ai formulée...
"Même quand tu rates c'est toujours délicieux maman !". Un gâteau qu'elle n'a pas peur de manger et avec lequel elle peut se régaler. Oui malade... oui la peur... elle se souvient bien de cette nuit a vomir, après avoir mangé une pistache, quand nous avons découvert son allergie, elle était pourtant guérie, c'est ce qu'on nous avait dit...
Trop gravement allergique aujourd'hui il faut encaisser que l'on vous dise que c'est à vie, que l'on ne peut rien faire pour elle, plus d'espoir. Il faut lui expliquer et l'aider à vivre ça au mieux.
Il faut réorganiser sa vie, une vie bien différente, en parler, informer, même si on n'aime pas parler de nos soucis, pour éviter les accidents lors de sorties... mettre son orgueil de côté, reconnaitre ses limites et se dire que l'on n'est pas de mauvais parents pour autant.
Ses mots prononcés en pleurant à l'idée de réintégrer un nouvel aliment résonnent encore dans ma tête "Maman je ne veux pas manger ça, maman je ne veux pas de problèmes le matin, je veux que tu sois là.".
Cette souffrance qu'elle ne montre pas, n'exprime presque jamais... qu'elle cache derrière son sourire et ses rires, qui sont pourtant bien là, cette insouciance qu'on tente de préserver malgré sa grande maturité pour son âge, acquise en apprenant à gérer ses allergies depuis toute petite.
L'année prochaine elle apprend à lire, on apprendra à lire les étiquettes...
En opposition, on apprend à profiter des moments simples que nous offre la vie, à ne pas se prendre la tête, à reconnaître l'essentiel. Finalement à bien y regarder, tout ça nous apporte beaucoup, on apprend l'humilité, l'amour, la patience, les vrais plaisir de la vie, à ne pas s'encombrer de choses inutiles, à relativiser... depuis la rentrée j'ai fait beaucoup de chemin, depuis plus longtemps même. Ce nouveau regard sur la vie que les épreuves m'ont apporté me donne aux yeux des autres un air décalé, un air que j'aime bien, un peu de fantaisie assumée que chacun devrait avoir.
Aujourd'hui le dossier MDPH (que j'arrive enfin à nommer) ne ressemble plus à une flèche achevant mon enfant mais à un de ces délicieux gâteaux sans fruits à coques que je lui prépare et avec lequel on est sûr que tout ira bien, qu'il ne la rendra pas malade.
Transformer la douleur en force et faire de grand pas c'est une belle victoire, j'avais ce sentiment de ne plus rien pouvoir pour ma fille mais c'est faux, je peux encore beaucoup. La bataille est loin d'être perdue !
Dans le mauvais il y a toujours du bon, les allergies comme toute maladie on peut choisir de ne pas les subir et de les utiliser pour avancer, elles peuvent nous permettre d'aller chercher au plus loin le meilleur de chacun et la force dont nous disposons pour affronter les défis de la vie.
Lorette
* Notre besoin de consolation est impossible à rassasier - magnifique livre de Stig Dagerman... repris en musique par les Têtes Raides... à lire et/ou écouter...
Oui Lorette, la vraie bataille n'est pas handicapé, allergique, diabétique...
RépondreSupprimerLa vraie bataille c'est le quotidien, c'est l'intégration, c'est la douceur de vivre, c'est au contraire la lutte contre toutes les formes d'exclusion...
Bravo d'avoir passé cette étape.
Nous souhaitons de tout coeur que ce dossier aboutisse, que tu puisses passer un peu de temps avec Alysse sur les moments délicats comme le temps des repas...
Je n'ai pas de mot... mais les tiens sont magnifiques, tellement juste et vrais...
RépondreSupprimerOui tu es une bonne maman... Ne l'oublies pas!
Merci aux hérisonnes pour leur soutien et de m'avoir permis de partager ces sentiments douloureux vis a vis de cette demande, de m'etre senti moins seule dans toute cette galère...
RépondreSupprimerEt un grand merci aux hérissons bleu pour leur soutien, Anne les mot dans ton article "le mal de chien" des mot que je ressentais mais ne pouvais exprimer. Merci de partager vos expériences qui me font me sentir moins seule dans cette galère.. Ce soir Alysse a encore eu des mots.. j'ai un peu laissé de coté le sport avec cette foutu rentrée qui s'est éternisée et se termine enfin, elle voulais jouer et me faire rire, mais je ne pouvais pas, quand j'arrête l'entrainement mon asthme réapparait... J'ai du lui expliquer que petite j'étais très asthmatique, elle a de la chance elle avec son traitement elle n'a pour le moment pas connu de crises, elle peut courir, rire.. toutes ces choses que je ne pouvais faire.. de plus l'asthme, non content de nous étouffer, c'est douloureux.. elle m'a répondu les larmes aux yeux "oui mais maman tu n'es pas allergique à la nourriture... tu peux manger ce que tu veux" "maman je n'aime pas manger toute seule" "maman je suis triste d'être allergique.." je lui ai parlé de Malo, elle a beaucoup de peine pour lui, elle lui envoi des bisous. Elle a séchée ses larmes et m'a fait un gros calin pendant plus d'1h...
RépondreSupprimerBravo pour cet article.
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