mardi 11 janvier 2011

Malabar 2011




Il m'a fallu du temps, présenter ses voeux c'est comme préparer une bulle avec un malabar dans la bouche.
C'est malaxer des mots, prévoir la bulle et les éclaboussures, prévoir le bruit de pétarade, les résidus autour de la bouche, et le parfum de fraise qui exhale.
C'est mâcher comme un forcené au départ et puis se laisser porter par le goût, les sens en éveil c'est ainsi porter ses voeux aux oreilles ou aux yeux. 
Voilà j'ai mâché cent fois, nous sommes le 11, je suis limite hors délais mais j'ai bien ruminé mes mots.
La bulle a quelque chose d'incongru, d'impoli, une intrusion sonore et sensuelle, moqueuse et puérile, naïve, mal venue, mal à propos, déplacée...
Je n'aime pas les débuts d'année. C'est ridicule ou juste.
Ruminé sur les mauvais mois, sur les mauvaises gens, les mauvais esprits les mauvaises heures les heures tendues les heures creuses les heures sans.
Ruminé sur les heures douces, des rubans d'eau fraîche, sur les heures douces les minutes de répit, jamais assez.
Clore 2010 à grand coups de lattes de bois ou fermer la porte simplement, tranquillement.
Il n'y a pas une méthode pour souhaiter que l'année qui suit soit comme on le voudrait.
En vérité dans ce contexte global, j'aurais tendance à me taire pour éviter d'être incongrue, déplacée, mal venue, mal à propos, maladroite... Ne rien dire n'est pas une solution non plus : c'est hors convenance, déplacé, mal vu.
Il y a 30 ans déjà, le 24 au soir, j'allumais des bougies dehors sur le rebord d'une fenêtre chez ma grand-mère, pour dire à ceux qui en avaient besoin que je pensais à eux, aussi. C'était ainsi.
Il y a 30 ans, le 1er je me penchais sur une carte peinte avec la bouche, Chère grand-mère, je te souhaite une belle année et surtout une bonne santé.
Est-ce qu'on vieillit ? Est-ce que vraiment "les temps changent" ou l'amertume, la solitude et l'individualisme malgré soi nous fait un lit sombre ?
Le 24 décembre 2010, on a installé le jeu vidéo, on a mangé un peu, on a ri aussi, on a tangué, un peu, en douceur avec une gentillesse et une douceur roboratives.
Je n'allume plus de bougie elles sont bannies chez nous depuis les crises d'asthme, elles ne tiendraient pas sur la fenêtre, seraient vite éteintes au vent qui semble vouloir tout ici. Et pourtant j'y ai pensé.
Le 1er je ruminais sur les 360 et quelques jours à venir et je ne me penchais sur aucune carte peinte avec la bouche.
Aujourd'hui je suis à la bourre c'est clair et je reculais le mur au pied duquel je devais échoir. 
Voilà j'y suis et cet exercice à lui tout seul ressemble à une girafe qu'on voudrait à tout prix faire passer dans une porte de ferme vosgienne. Basse.
La seule chose qu'il faudrait souhaiter serait absolue : que les mots, les espoirs, ne soient plus vains, qu'ils soient portés par des gens dignes et dignes de foi, que l'amitié, la fraternité, l'entraide, ne soient pas des outils rouillés dans la remise, qu'ils illuminent les 350 et quelques qui vont venir s'entasser comme des bêtes sauvages et avides au pied de notre porte, que les combats justes - et lesquels - aboutissent enfin, qu'on cesse de moquer, de faire fi de, de rester comme je le fais parfois, les yeux au fond des poches pour moins de fatigue et de dégoût.
Un peu d'amour et de générosité, de considération et d'empathie.
Allez 2011, tu peux venir, j'ai crevé la bulle, viens sans ton sale boulot de sape et tes angoisses fulgurantes, fiche-nous la paix deux minutes et laisse-nous regarder la mer avec ceux qu'on aime, le soleil qui se couche dessus comme un vieux chien tranquille et humble.



3 commentaires:

  1. Tu as tellement raison. Et en même temps, le combat est épuisant. Les petites bougies sur la fenêtre, je m'en souviens bien, c'était pour soutenir Solidarnosc. C'était le temps de l'espoir... L'histoire est faite de terribles aller-retour. Je t'embrasse.

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  2. Eh bien moi, je fais dans les voeux traditionnels. Je nous souhaite (à moi aussi, na!!) une vraie bonne année 2011.
    Que nous parvenions tous à lâcher un peu prise afin de profiter des moments de bonheurs petits ou grands (là oui, je sais, il y a du boulot...) .

    Sandra

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  3. A Josiane : oui parfois c'est épuisant ! Difficile de faire vivre des associations dans ce contexte, et on comprend aussi ! merci, bisous aussi.
    A Sandra : mais oui ;) belle et heureuse année, les voeux traditionnels sont aussi les plus doux (mais oui on a du boulot ^^ mais on y arrivera!!)
    Une VRAIE bonne année 2011 ça ça sonne juste !
    Ca fait du bien de vous lire toutes les deux ;)

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